APPROCHE par Charles Juliet
L’être qui a eu à vivre la mort à soi-même a été dépouillé des illusions, des prétentions, des simagrées du moi et a atteint une certaine impersonnalité. Il est simple, modeste, il aime le silence, le retrait, se tient au contact de ses ressources et à l’écoute de sa nécessité. Après s’être éprouvé, il ne craint plus de s’abandonner au non vouloir, de s’immerger dans la tiédeur de la source. Se lover au plus intime de soi est même ce qui est recherché. En peignant, c’est aussi très exactement ce que recherche Fabienne. Etre un – soit n’être plus divisé, ne plus souffrir de la dualité- est une jouissance extrême. Qui a connu cette jouissance ne cesse plus de vouloir la connaître à nouveau. Toutes limites abolies, reployé en son centre mais ouvert au monde, l’être se trouve projeté hors du temps, et la vie qui soudain surabonde le submerge d’un amour sans raison.
L’ENTRETIEN
Charles Juliet
- Sur la toile, le geste doit être fulgurant …
Fabienne Verdier
- Non. Je vous interromps, le geste ne doit surtout pas être « fulgurant ». Le mouvement du flux ne naît pas dans la précipitation d’une érection facile.
C’est très étrange. La trop grande rapidité d’exécution ne peut produire la matière interne nécessaire à la concrétisation du mouvement. Seule une sorte d’instantanéité « retenue » de la pulsion transmet de l’énergie vitale. On est dans une totale pauvreté physique, matérielle et intellectuelle. Un abandon d’apparence. Comme un génie subtil, l’esprit mobile nous habite et vient animer le souffle. Le rythme prend alors naturellement corps dans l’espace.
J’essaie d’amener le contemplatif de l’œuvre à se questionner sur la forme comme elle va…
Charles Juliet, Entretien avec Fabienne Verdier, Albin Michel, 2007, p.16, 60-61
Fabienne VERDIER invitée aux MOTS DE MINUIT chez Philippe LEFAIT
le 5 Décembre 2007
le 5 Décembre 2007