vendredi 30 avril 2010
samedi 29 novembre 2008
la traversée, Charles Juliet et Jean-Michel Marchetti
Deux raisons au moins m’ont fait organiser ma vie autour de l’écriture. Elles m’étaient tout à fait claires lorsque j’ai eu à changer de cap.
À vingt-trois ans, après avoir porté un uniforme pendant onze ans (École d’enfant de troupe, puis École du service de santé militaire), il m’a fallu refuser ce qui m’était imposé .Certaines circonstances avaient voulu que je sois engagé sur cette voie, et je ne l’acceptais plus. J’éprouvais un incoercible désir d’être libre, de prendre mon destin en main, de devenir responsable de ma vie.
Par ailleurs, le besoin d’écrire s’était emparé de moi –un besoin absolument impérieux, avec lequel il n’était pas possible de transiger .Un jour, j’ai donc décidé de me faire réformer. J’y suis parvenu, et pour moi, une vie nouvelle a commencé. Mais cette rupture m’avait déstabilisé, et un long temps a dû passer avant que je ne me récupère.
Dès que j’ai été libre, ma vie s’est effectivement organisée autour de l’écriture. Et parce que j’étais désemparé, que je redoutais d’aller à vau-l’eau, je me suis soumis à une sévère discipline.
Pendant longtemps, j’aurais été incapable de dire ce qui se trouvait à la source de cette nécessité intérieure. Une brume impénétrable rendait cette source invisible. Mais la brume a fini par se dissiper et je pense maintenant que cette nécessité a ses racines dans mon enfance. Je l’ai découvert en écrivant Lambeaux, un récit autobiographique qui m’a conduit à élucider certaines choses me concernant.
livre d’artiste
la traversée
texte inédit Charles Juliet
sérigraphies Jean – Michel Marchetti
édition médiathèque municipale
Romorantin-Lanthenay
Novembre 2008
Médiathèque municipale Jacques Thyraud
lundi 19 mai 2008
Charles Juliet à Bordeaux, Librairie Mollat
Evénement Bordeaux - Expositions et visites : Claude Lagoutte (1935-1990)
L'art du promeneur. Composée d'environ quatre-vingts oeuvres, l'exposition regroupera les longs rouleaux de plus de 10 mètres, des oeuvres de dimensions moyennes, des tapisseries tissées par les ateliers d'Aubusson, des oeuvres sur papier (lettres de voyages, carnets de voyages, gouaches, dessins...) provenant de collections publiques (MNAM, différents FRAC, FNAC, musées) et de collections privées de l'artiste Claude Lagoutte. Les longues marches de Claude Lagoutte sont à l'origine d'une toile, libre de châssis, imprégnée des pigments et terres recueillis sur son chemin. Le parcours du marcheur rythme le rouleau déployé, selon des bandes de toiles découpées, froissées, pliées et teintées puis cousues horizontalement à la machine.
du vendredi 23 mai 2008 au lundi 1 septembre 2008
Lieu: MUSEE DES BEAUX-ARTS DE BORDEAUX
20 cours d'Albret , 33000 BORDEAUX
Téléphone: 05 56 10 20 56
Fax: 05 56 10 25 13
jeudi 31 janvier 2008
Charles Juliet , Texte publié dans Bram van Velde Lithographies originales
FACE A LA TOILE
Bram van Velde ne se mettait à peindre que lorsqu’un profond besoin l’y contraignait. Au cours de cette attente qui pouvait durer des semaines, des mois, une énergie s’était accumulée en lui, et c’est cette énergie qui le poussait à entreprendre une toile. « La peinture ne m’intéresse pas. Ce que je pense est en dehors de la peinture. » . Ce qu’il peignait, c’était son attente, son affût, ce travail qu’il accomplissait sur lui-même en vue d’éliminer ce qui s’opposait au surgissement de la vie.
L’ŒUVRE
Contrairement à beaucoup de peintres qui sont habiles de leurs mains, aiment à tendre leurs toiles, sont à l’aise dans le concret, prennent éventuellement plaisir à bricoler, Bram van Velde était d’une grande réserve face aux choses et à la vie pratique.
[ …]
Il n’avait d’ailleurs besoin pour peindre que de peu de chose : une feuille de papier blanc punaisée sur un panneau de bois, deux ou trois pinceaux, quelques tubes de couleur, une assiette et un verre d’eau.
L’HOMME
Il se disait brouillé avec le langage, les mots. Enfoui en son centre, il percevait qu’ils ne sont pas à même de recevoir ce qu’on les charge de transmettre. Plutôt que de mal s’exprimer, il préférait se taire. « Je ne peux pas employer les mots. Parfois, ils ont évidemment une certaine utilité. Mais l’essentiel, ils n’ont pas pouvoir de le dire. »[…]
De tout ce qu’il a enduré, traversé, obtenu, il a nourri son œuvre. « Tout ce que j’ai peint est la mise à jour de quelque chose de vrai. Et par là d’inépuisable. »
_____________________
Bram van Velde, Maeght Editeur, 1993, p. 15-19
Lithographies originale Textes de Charles Juliet Chercher la vie
et de Georges Duthuit Bram van Velde ou Aux colonnes d’Hercule
mardi 11 décembre 2007
samedi 8 décembre 2007
Charles Juliet, Entretien avec Fabienne Verdier
APPROCHE par Charles Juliet
L’être qui a eu à vivre la mort à soi-même a été dépouillé des illusions, des prétentions, des simagrées du moi et a atteint une certaine impersonnalité. Il est simple, modeste, il aime le silence, le retrait, se tient au contact de ses ressources et à l’écoute de sa nécessité. Après s’être éprouvé, il ne craint plus de s’abandonner au non vouloir, de s’immerger dans la tiédeur de la source. Se lover au plus intime de soi est même ce qui est recherché. En peignant, c’est aussi très exactement ce que recherche Fabienne. Etre un – soit n’être plus divisé, ne plus souffrir de la dualité- est une jouissance extrême. Qui a connu cette jouissance ne cesse plus de vouloir la connaître à nouveau. Toutes limites abolies, reployé en son centre mais ouvert au monde, l’être se trouve projeté hors du temps, et la vie qui soudain surabonde le submerge d’un amour sans raison.
L’ENTRETIEN
Charles Juliet
- Sur la toile, le geste doit être fulgurant …
Fabienne Verdier
- Non. Je vous interromps, le geste ne doit surtout pas être « fulgurant ». Le mouvement du flux ne naît pas dans la précipitation d’une érection facile.
C’est très étrange. La trop grande rapidité d’exécution ne peut produire la matière interne nécessaire à la concrétisation du mouvement. Seule une sorte d’instantanéité « retenue » de la pulsion transmet de l’énergie vitale. On est dans une totale pauvreté physique, matérielle et intellectuelle. Un abandon d’apparence. Comme un génie subtil, l’esprit mobile nous habite et vient animer le souffle. Le rythme prend alors naturellement corps dans l’espace.
J’essaie d’amener le contemplatif de l’œuvre à se questionner sur la forme comme elle va…
Charles Juliet, Entretien avec Fabienne Verdier, Albin Michel, 2007, p.16, 60-61
le 5 Décembre 2007
dimanche 4 novembre 2007
Charles Juliet, Giacometti
Silhouettes aiguës, fragiles, maintenues à distance par leur structure filiforme, nous signifiant l’éloignement, la solitude, cette irréductible séparation qui nous coupe de notre semblable.
Visages tellement graves . Effarés. Fixés à l’extrême d’une tension où s’exacerbe ce qui les brûle.
Yeux dilatés par l’angoisse. Par le désir acharné de comprendre, de connaître, de coûte que coûte faire surgir la réponse.
Etres nus, nus, sans défense. Incapables de biaiser, de fuir, de se fermer à ce qui tant les effraie.
Atmosphère tragique. Densité des visages. Instants cruciaux où quelque chose de vital est en jeu.
Force résolue. Contraints au face à face avec ce qui, d’un moment à l’autre , pourrait les terrasser.
Affrontement. Combat. Yeux qui refusent de ciller .
L’extrême fragilité étayée par une force que rien ne fera reculer.
Un homme stupéfié. Terrorisé. Saisi juste avant cet instant où il va s’effondrer.
Peut-être sombrer dans la démence.
Assujetti au temps. Agressé par la vie. Encerclé par la mort.
Mes yeux dévorant ces yeux où s’exaspèrent des questions auxquelles ils me somment de répondre.
Renvoyé en cette région de moi-même où tout n’est qu’appréhension, peur, effroi devant l’énigme.
L’irrépressible montée de l’angoisse.
Mais j’oubliais, j’oubliais. Un homme certes réduit à bien peu. Mais un homme debout. Un homme debout. Dressé par une force quasi surhumaine qui naît une fois vaincue la peur, une fois franchi le désespoir, une fois qu’après bien des épreuves et des luttes a surgi le oui d’un définitif consentement.
Giacometti, P.O.L., 1996, p.67-69
mardi 9 octobre 2007
Charles Juliet , Une joie secrète
efface-toi
détruis
jusqu’au
désir
du sans-
désir
sois
ce rien
que tu as
si souvent
invité
et laisse
le souffle
te rythmer
déployer
son chant
*
Charles Juliet , une joie secrète avec des lavis de Bang Hai Ja
Traduction en Coréen par Choi Kwon Hang
Voix d’encre, 2002
Réédité en 2007